Emilia Pardo Bazán
Contes d’amour
Ce recueil présente 26 nouvelles inédites, publiées entre 1891 et 1909. L’écrivaine espagnole se trouve alors au fait de sa célébrité en tant que romancière, ce qui lui permet d’approfondir le récit court, genre qu’elle affectionne particulièrement et dont elle est encore maintenant la meilleure représentante en Espagne. Les histoires ici racontées explorent tous les aspects de l’amour : amour-passion, amour-compassion, désamour, amour à tout âge, amour pour un inconnu, amour au-delà de la mort… sans oublier l’infidélité et la violence amoureuse.
Titre original : Cuentos de amor (Espagne)
Traductrice : Isabelle Taillandier
Préface : Ana María Freire López
Illustrations : Ignacio M. Jiménez
Date de parution : 15 octobre 2020
ISBN : 978-2-491528-11-9
208 pages, broché, format 11x18
Prix : 16 €
Quatrième de couverture
Dans la sélection du présent recueil, on retrouve la thématique amoureuse sous tous ses angles - illusions et désillusions - avec une vision très ample : amour-passion et amour-compassion, amour et désamour de jeunesse, amour et désamour conjugal, amour à tout âge, amour pour un inconnu, amour au-delà de la mort. Au milieu de contes qui mettent en évidence l’inégalité entre l’homme et la femme dans la société de l’époque, on trouve également des récits d’infidélité féminine. (…) Dans les dernières décennies de sa vie, Emilia Pardo Bazán, sans abandonner le roman, écrit un grand nombre de contes. Grâce à la presse périodique, il s’agit d’un genre au succès croissant auquel l’écrivaine réfléchit depuis longtemps. Elle sait que c’est un genre qui « requiert des dispositions spéciales » et elle reconnaît qu’elle les possède. Elle se sent à l’aise car, en ce qui concerne les thèmes et les sources, « il n’y a pas de genre plus vaste et libre que le conte. » (Ana María Freire López)
A propos de l'auteur ...
La comtesse Emilia Pardo Bazán (1851-1921) est une femme de lettres espagnole. En 1882, elle publie La cuestión palpitante, un essai fondamental pour la défense du naturalisme. Cet essai soulève une immense polémique qui contribue à la notoriété de son auteure mais lui coûte son mariage. En 1886, elle publie son roman naturaliste le plus célèbre, Le Château d’Ulloa, même si elle s’écarte ensuite du naturalisme à partir des années 1890. Elle est également célèbre pour les quelque cinq cents contes qu’elle a publiés entre 1885 et 1912. Fervente avocate de la cause féministe, elle se bat notamment pour le droit des femmes à une instruction de même niveau que celle accordée aux hommes.
Extrait 1
Invitée au mariage de Micaelita Aránguiz avec Bernardo de Meneses, et n’ayant pu y assister, quelle ne fut pas ma surprise quand j’appris le jour suivant - la cérémonie devait avoir lieu à dix heures du soir chez la mariée - que celle-ci, au pied de l’autel, après que l’évêque de saint Jean d’Acre lui eut demandé si elle acceptait Bernardo comme époux, avait émis un « non » clair et énergique. L’évêque étonné ayant répété la question, puis obtenu la même réponse négative, le marié, après avoir affronté pendant un quart d’heure la situation la plus ridicule du monde, avait dû partir, la cérémonie et le mariage se trouvant ainsi annulés.
Ces situations ne sont pas inédites, nous avons l’habitude de les lire dans les journaux. Mais elles sont le propre des classes modestes, très humbles, chez lesquelles les convenances sociales ne s’embarrassent pas de manifestations franches et spontanées des sentiments et des désirs. (La dentelle déchirée)
Extrait 2
Un des sujets que Pablo Roldán voyait de façon originale, voire choquante, était celui de l’infidélité de l’épouse. Précisons que Pablo Roldán était marié, de surcroît avec une femme de bonne famille, jeune, belle, élégante, qui attirait les regards et volait le cœur de ceux qui la voyaient. Un tel trésor aurait dû rendre vigilant son gardien. Mais Pablo Roldán ne faisait pas seulement étalage d’une confiance aveugle, proche de l’imprudence, il déclarait aussi que la vigilance lui semblait inutile car, ne se considérant pas « propriétaire » de sa belle moitié, il ne se voyait pas dans la situation d’un gardien, comme on garde une vigne, un terrain ou des biens précieux. « Une femme, disait Pablo en souriant, est différente d’un fruit ou d’une liasse de billets de banque car elle possède une conscience et l’usage de la parole. Personne n’a jamais eu l’idée d’accuser une pêche parce qu’un rat l’avait volée puis mangée. La femme est compétente et responsable. Ecoutez, sous mes airs bonhommes, je suis en fait plus rigide que vous, gens d’Estrémadure, qui êtes jaloux. La femme est responsable, coupable… comprenons-nous bien, quand elle trompe. La mienne ne pourra jamais bien sûr me tromper, moralement j’entends, car je serais le dernier des imbéciles si, en m’approchant d’elle, je ne comprenais pas l’impression que je lui fais, savoir si elle m’aime ou au contraire si je lui inspire de l’indifférence ou un rejet catégorique. Ma femme n’aura pas besoin de me tenir au courant de son état d’esprit, je le devinerai… Il ne manquerait plus que ça ! L’ayant deviné, aussi vrai que je m’appelle Pablo Roldán et me tiens pour un homme d’honneur, je considérerai brisé le lien qui me lie à elle, ne ferai pas offense au Créateur en violentant une âme fondamentalement égale à la mienne. A partir du jour où elle ne m’aimera plus, ma femme sera « intérieurement » libre comme l’air. Toutefois (le lien légal étant en effet indissoluble et l’erreur par ailleurs partagée), je lui dirai qu’elle est obligée de garder les apparences, de faire très attention à son attitude face au monde extérieur, afin que je ne devienne pas la risée de tous. Moi, de mon côté, je me croirai dans le devoir de continuer de la protéger, de lui servir de rempart contre le mépris. Il semble cependant que Felicia ne m’ait pas encore retiré son affection… Ce sont des théories, et vous savez bien que, face à la pratique, bien rare est l’homme qui les applique à la lettre. » (Justice ?)
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