Traduit de l’allemand par Isabelle Taillandier
Son avantage s’appelait « jeunesse ». Sa seule conviction était que rien ne lui paraissait impossible. Il avait vingt ans et s’appelait Peter Brockmann. Sans être plus doué qu’un autre, ce qui le distinguait toutefois était la conscience enthousiaste de sa propre valeur. Il faisait aveuglément confiance à son sourire, à l’éclat de ses yeux bleu gris. Il se croyait irrésistible quand il rejetait sa tête en arrière d’un air têtu, puis secouait triomphalement sa chevelure blonde.
Klaus MANN (1906-1949) est un écrivain allemand. Fils cadet de Thomas Mann, il grandit entouré des intellectuels et des artistes allemands les plus importants de son époque. Il commence sa carrière littéraire à 18 ans, puis voyage énormément avec sa sœur aînée Erika. Violemment opposé au national-socialisme, il s’exile dès mars 1933 et fonde à Amsterdam une revue proposant des textes d’auteurs combattant le nazisme. Lui-même publie deux romans importants : Méphisto (1936) et Le Volcan (1939). Après la guerre, marqué par les suicides d’amis proches, inquiet du devenir de l’Allemagne, conscient de la crise morale européenne, il se suicide à Cannes.